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Vivre le deuil

Lorsque nous entendons le mot “deuil”, nous pensons immédiatement, pour la grande majorité d’entre nous, à la mort d’un être cher.

Pourtant, de nombreuses autres situations, souvent placées sous silence car considérées comme « moins grave » nécessitent elles aussi de traverser un processus de deuil.

Je n’aime pas l’expression « faire son deuil », ni l’expression « travail de deuil ». Les deux impliquent, à mon sens, une sorte de proactivité, de volontarisme, qui va dans le sens de ce que la société dans laquelle nous évoluons nous renvoie sur ce sujet, et qui va à l’encontre de mes valeurs personnelles.

Dans un contexte culturel sans cesse en quête de plus de performance, de productivité, le deuil est souvent mal vu. Combien d’entre-nous avons déjà entendu, ou même dit « Il est temps qu’il/elle fasse son deuil », « il est temps de tourner la page ; de passer à autre chose ; d’avancer » quelques semaines ou mois à peine après un décès?

« Il est temps »

« Il faut »

Selon qui ? Quels sont les critères de bienséance à respecter pour bien « faire son deuil » ?

Recherches et théories.

Elisabeth Kubler-Ross, qui a beaucoup écrit sur la fin de vie, la mort et le deuil, décrit dans « Sur le chagrin et le deuil » un processus en cinq étapes :

1- le déni. C’est la phase initiale, la réaction au choc de la perte, le refus de croire à la réalité. Cette phase est particulièrement marquée en cas de mort inattendue. Face à la violence du choc, notre psyché réclame un temps d’adaptation.

Cette phase est généralement assez courte, et marquée par une sorte d’engourdissement émotionnel.

2- la colère. Une fois la phase de déni passée, c’est l’injustice de la perte qui s’exprime. C’est la phase du « Pourquoi ? ». Il est assez fréquent que cette colère se manifeste par une agressivité envers ses proches, un rejet de toutes les formes d’aide proposées.

3- le marchandage. La détresse face à l’absence, lors de cette phase, nous pousse à négocier avec nous-mêmes afin de trouver un moyen de combler ce vide.

C’est souvent le moment où nous nous tournons vers la spiritualité (quelle que soit la forme que celle-ci prend pour nous, et elle peut être totalement détachée de toute croyance religieuse) pour y trouver un réconfort, même lorsque nous le savons illusoire.

4- la dépression. C’est souvent l’étape la plus longue et difficile à traverser. Nous réalisons la perte, son caractère définitif.

C’est une étape marquée par la tristesse, qui se reflète souvent par une perte d’énergie et un repli sur soi. On se coupe de sa vie sociale, on se sent épuisé. Émotionnellement, c’est souvent une phase de « montagnes Russes » : tristesse, culpabilité, regrets peuvent parfois nous donner l’impression d’être submergés.

5- l’acceptation. Cette dernière phase est celle qui marque le début de la reconstruction. La personne endeuillée retrouve peu à peu son énergie et le goût pour ses activités habituelles. La vie se réorganise en tenant compte de la perte.

Cela ne signifie évidemment pas que la douleur disparaît. Cependant, ses manifestations se font plus rares, plus courtes, et n’entravent plus le déroulement du quotidien. La perte et la douleur s’inscrivent dans le parcours de la personne endeuillée, comme une étape franchie.

Il est à noter que de nombreux chercheurs et psychologues ont opposé de vive critique à la théorie d’Elisabeth Kubler-Ross (Bolwby, 1980 ; Silver & Wortman, 1980 ; Wortman & Silver, 1987, 1989, 1992), allant jusqu’à dire que l’adoption parfois aveugle de cette théorie par les professionnels de l’accompagnement pouvait avoir des conséquences désastreuses sur les endeuillés.

Ils ont souvent pointé du doigt une approche qu’ils jugeaient trop linéaire, là où de nombreuses personnes font des allers-retours entre différentes phases.

Shuchter & Zisook (1993) ont ainsi mis en garde contre l’application littérale de cette théorie à l’accompagnement thérapeutique du deuil : « Le deuil n’est pas un processus linéaire avec des frontières bien délimitées, mais plutôt un ensemble d’étapes fluides et parfois superposées, qui varient en fonction de chaque personne . »

Si je trouve, à titre personnel, que les étapes du deuil décrites par E. K-R permettent de mettre l’accent sur les aspects universels des réactions face à la perte, et de « normaliser » le fait que ce processus nécessite du temps, je suis également d’accord avec ses critiques.

Chaque individu traverse son deuil à sa manière, avec ses moyens, le contexte dans lequel il évolue, le soutien reçu (ou non), son parcours de vie, sa présence et sa bienveillance à ses propres émotions, mais aussi en fonction des relations avec la personne disparue.

De plus, il y a des spécificités liées à chaque situation. Un deuil qui survient à la suite d’une longue maladie ne sera pas le même qu’un deuil qui survient suite à un accident de la route, ou suite à un suicide.

Christophe Fauré, psychiatre et psychothérapeute spécialisé dans l’accompagnement des ruptures de vie, parle de « temporalité du deuil » : une étape de sidération de quelques jours, suivie d’une étape de recherche de la personne perdue, visant à maintenir le lien. Vient ensuite la déstructuration, phase de douleur plus intense. Enfin, vient une dernière étape d’intégration, de restructuration.

Pour l’écouter décrire ces étapes :

https://www.allodocteurs.fr/archives-quelles-sont-les-differentes-etapes-du-deuil-10698.html

Je ne peux que vous conseiller la lecture de ses livres, en particulier « Vivre le deuil au jour le jour » et « Après le suicide d’un proche » si cette situation vous concerne.

C’est de loin l’auteur que je préfère lire sur ces thématiques (mais aussi sur d’autres, il est absolument formidable).

Vous pouvez également l’écouter ou le regarder.

Sa conférence sur « Vivre le deuil au jour le jour » est disponible ici (elle dure 1h32, mais ça vaut le coup!) :

Sur le deuil après suicide, vous pouvez également visionner cette interview :

https://lavielamortonenparle.fr/video/le-deuil-apres-un-suicide-leclairage-du-psychiatre-christophe-faure/

Comment aborder le deuil ?

Ce que j’aime particulièrement dans l’approche de Christophe Fauré, c’est qu’il permet d’aider à ce que le deuil fasse moins peur.

Dans une société où l’immédiateté prime, où les émotions sont cataloguées comme « positives » ou « négatives », le deuil, avec la tempête émotionnelle qui l’accompagne, fait peur.

On ne sait pas quoi dire, pas quoi faire, on marche sur des œufs, on fait comme si de rien n’était. On veut que ça aille vite, et surtout que ça ne dérange pas trop.

Pourtant, personne n’y échappe. Le deuil, la perte, la mort, font partie de la vie. Dans de nombreuses cultures, un temps de deuil de plusieurs mois est respecté.

Les rituels entourant la mort semblent remonter au Néolithique (avec l’apparition de sépultures élaborées comme le tumulus). Les rites funéraires sont apparus dès le fondement des civilisations, et n’ont cessé d’évoluer à travers les âges.

Dans notre société, ces rites se perdent. Les obsèques sont souvent organisées à l’avance, les veillées se font rares, les cérémonies, ou tout est organisé à la minute près, doivent aller vite, et laissent rapidement place à un grand vide, qu’on ne sait comment occuper, alors même qu’on a encore besoin de célébrer l’être cher.

Il existe des thanadoula, des personnes qui accompagnent la fin de vie, et les endeuillés, et organisent des rituels adaptés aux besoins de chaque famille. Cela peut être d’un grand soutien, n’hésitez pas à vous renseigner ici https://www.thanadoula.fr/

Prendre le temps du deuil, c’est accueillir et accepter les émotions qui lui sont liées, même si elles s’expriment avec force.

Toutefois, il faut rester vigilant. Lorsqu’un deuil, par sa longueur (plus d’un an) et son intensité, devient complexe et persistant, il peut devenir un deuil dit « compliqué » ou un deuil pathologique.

Il est alors essentiel de consulter un professionnel de santé mentale. Un médecin psychiatre sera à même de poser un diagnostic et de vous orienter et vous accompagner dans votre reconstruction.

Pour vous aider à déterminer où vous en êtes, vous pouvez consulter le lien suivant ;

https://sante.journaldesfemmes.fr/fiches-sante-du-quotidien/2680467-deuil-pathologique-complique-definition-criteres-dsm-5-duree-traitement-therapie/

Le deuil, ce n’est pas seulement faire face à la mort.

Comme je le disais en préambule, de nombreuses situations de vie nous font traverser une période de deuil, pas seulement la perte d’un être cher.

On peut également traverser un deuil à la suite d’une rupture (on fait alors le deuil d’une relation), d’une perte d’emploi ou d’un départ à la retraite (on fait alors le deuil de la part de nous fortement identifiée à ce travail), d’une grossesse (on fait alors le deuil de sa vie d’avant la parentalité, parfois également de son corps d’avant), d’une maladie, de la perte d’un membre (amputation par exemple), du départ de ses enfants qui quittent le nid familial.

Ces deuils sont souvent passés sous silence, parfois par pudeur (on se dit que ce n’est rien comparé à la mort d’un proche), ou par honte (on se dit qu’on est ridicule de réagir aussi intensément « pour si peu »)

Pourtant, les ressentis sont indéniablement présents, et les nier ne peut que vous empêcher de traverser ce processus nécessaire à votre reconstruction.

Quelle que soit la situation dans laquelle vous êtes, dès lors que vous ressentez le besoin d’être entendu, d’être accompagné, vous avez toutes les raison de vous écouter.

Comme le disait Albert Camus : « Parler de ses peines, c’est déjà se consoler . »

L’hypnose permet d’accompagner le deuil en douceur et de favoriser la complétion du processus de deuil. Elle permet d’exprimer et de libérer les émotions (même et surtout celles dont nous n’avons pas conscience), de redéfinir les liens (ou parfois, de les couper lorsque c’est nécessaire), et de faciliter la reconstruction.

Autour de Dijon et Is-sur-Tille, ou bien en visio, je vous accompagnerai, si vous le souhaitez, dans l’écoute et le respect.

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